Le carnet d'Intima
20 novembre 2024
Pour Michaela Stark rien ne les sépare, au contraire elle utilise la couture et la mode, loin d’être « frivoles », comme médiums pour expérimenter son Art, cherchant à accéder à de nouvelles beautés esthétiques et artistiques corporelles sous toutes leurs formes.
Un parcours tracé où se mêlent couture et Art
Après son Baccalauréat de Design de Mode obtenu en Australie, Michaela s’envole pour Londres en 2017 où elle est engagée en tant que couturière par de jeunes Maisons britanniques. En 2018, elle est enrôlée par Beyoncé comme tailleurs sur le tournage de son clip « Apeshit ».
Filmée au Musée du Louvre, la vidéo donne tout son sens à la fusion recherchée par Michaela dans son travail entre couture et Art. L’expérience, qui s’est prolongée pendant la tournée européenne de la star, a été une révélation pour Michaela qui a pu accéder à la conception de pièces haut de gamme. La couturière artiste aura par la suite l’occasion d’habiller d’autres célébrités comme Julia Fox, Celeste, Shy Girl, Tove Lo ou Gigi Hadid et même des hommes, comme le chanteur de musique pop Sam Smith. Puis ce fut Paris et des collaborations avec Marine Serre, Cartier ou Louboutin.
La lingerie : un rêve inatteignable ; le corps : une obsession
Michaela a toujours été attirée par la lingerie, mais n’ayant pas un corps répondant aux standards de beauté classique affichés dans les publicités, l’artiste ne s’y projetait pas, pire encore, elle ne trouvait pas de produits correspondants à sa morphologie. Se sentant « rejetée » par ce monde générateur de fantasmes normés et inaccessibles, Michaela développa son propre processus créatif autour de l’approche d’une nouvelle esthétique du corps par le « bodymorphing ». Elle s’y consacre pleinement à partir de 2020 et son Art attire alors les regards du milieu de la mode qui l’amène à travailler pour des Rédactions et à collaborer avec des artistes tels que les photographes Paul Kooiker et Brigitte Niedermair. Dans son œuvre, et particulièrement dans sa série de 2020 intitulée « Second Skin », Michaela s’inspire de la façon dont le corps nu bouge et de ses mouvements naturels qui le transforment. Dans une démarche expérimentale, l’artiste a observé les incidences sur sa propre silhouette et ses transformations liées à différentes postures ou conditions environnementales : si elle est assise ou si elle fait du yoga, si elle subit les aléas de l’apesanteur ou, au contraire, si elle flotte dans l’eau, si elle pince, tire sa peau ou ressert ses chairs par des vêtements ou des laçages.
Le corset comme messager
Dans son atelier situé à Londres, Michaela explore les possibilités qu’offre la couture, et en particulier le corset, pour rendre visible la réalité brute des corps. S’appuyant sur les techniques apprises en étudiant les œuvres de grands couturiers, l’artiste utilise les méthodes de « bonding » et de « drapage », qu’elle applique sur son propre corps, pour accéder à l’esthétique qu’elle recherche. Aspirant à provoquer une émotion pure et immédiate, relevant de la fascination ou à l’inverse de la répulsion, Michaela consacre la majeure partie de ses journées à la création et à la confection de corsets savamment étudiés pour révéler ventre, bourrelets, vergetures, affaissements des chairs, asymétries anatomiques et ainsi briser les codes classiques de la beauté stéréotypée. Un contre-emploi osé de ce sous-vêtement, conçu à l’origine pour au contraire cacher, lisser le corps féminin et le conformer à des standards bien précis dictés par la société. Une manière de se rebeller contre ces diktats et de porter un message de splendeurs et de fantasmes différents, ne se limitant pas aux modèles conformistes ou socialement acceptables.
Selon ses propres mots et à juste titre, Michaela interpelle : « je trouve amusant que dans la nature nous puissions apprécier toutes les différentes formes de beauté, sans qu’aucune n’annule les autres. Si une fleur de cerisier est émouvante et belle, cela signifie-t-il que la fleur de rosier ne l’est pas ? ». Avec cette même réflexion appliquée au corps humain, l’artiste tente de prouver que le beau non-conventionnel a aussi sa place, interrogeant avec puissance sur l’essence, le sens même de ce dernier et l’acceptation de sa diversité au-delà des normes. Depuis quinze ans, l’artiste créé ses pièces sur mesure en utilisant soie, tulle invisible, baleines et réalise jusqu’à cinq toiles avant d’obtenir la forme parfaite. Une fois que la pièce ressemblant à une chrysalide est montée, Michaela l’embellira à la main de broderies, plissés ou cristaux par exemple.
Une collaboration avec Victoria’s Secret
Lors du « Tour 2023 », évènement organisé par Victorias’s Secret, Michaela a été invitée parmi vingt participants à réaliser des silhouettes exclusives pour la célèbre marque de lingerie qui tente de se repositionner vers plus d’inclusivité. L’occasion pour l’artiste de prouver que la lingerie ne se limite pas à un seul type « d’anges » mais peut s’ouvrir à des morphologies plus corpulentes ou des corps transgenres. Une revanche pour elle qui, adolescente, avait pendant un temps cessé de manger pour correspondre aux modèles aux lignes parfaites qu’elle voyait défiler pour la marque… Comme dotée d’une machine à remonter le temps, Michaela a été encouragée à s’inspirer des archives pour créer de nouveaux looks correspondants aux corps non-conventionnels des modèles Jade O’Belle et Ceval. Ainsi sont nés des corsets coutures qui ont « transformé les chairs, mis en valeur les ventres, les graisses d’une manière douce, délicate et féminine » selon les mots de la couturière artiste. Malheureusement, le show n’a pas remporté l’adhésion escomptée, mais Michaela y a vu l’occasion de porter encore plus loin son message et ses questionnements autour de la beauté.
Consacrée à la Fashion-Week
Michaela Stark a participé à la dernière Fashion-Week automne-hiver 2024 de Milan où elle a présenté son travail sous forme d’exposition à la Fondazione Sozzani. L’exhibition réalisée en partenariat avec la photographe Charlotte Rutherford racontait son parcours expérimental autour du corps dans une mise en scène s’inspirant de son atelier londonien. S’y entremêlaient fleurs suspendues, photographies ludiques et surréalistes représentant des « poupées maniaques », notes et ébauches fixées au ruban adhésif. Lors de l’inauguration, une performance mettait en scène la mannequin aux courbes voluptueuses Yasmin El Yassini que l’artiste Michaela a transformée, sous le regard des spectateurs, grâce à ses méthodes de drapages qui laissaient apparaître sa chair d’une manière libératrice pour transformer son corps. La semaine de la mode fut également l’occasion rêvée pour Michaela de lancer sa propre marque de lingerie nommée « Panty », créée avec sa partenaire Raga Muñecas. Au milieu des rubans, toiles, machines à coudre et mannequins trônaient sept poupées vêtues de voilettes, de tulles et de baleines, qui présentaient cette première collection. L’objectif pour la créatrice est de créer de magnifiques pièces conçues pour sculpter en douceur le corps féminin et mettre en valeur ses formes et ses courbes naturelles. La collection inclusive mise au point sur une taille L, afin de s’assurer que les courbes généreuses soient prises en compte dès la conception, est disponible jusqu’en taille 5XL. Pour Michaela, il s’agit d’une nouvelle approche de la lingerie, inventée pour le regard féminin. En développant sa ligne, l’artiste espère convaincre les marques de dessous que le luxe et l’inclusivité peuvent se rencontrer, ont une place et qu’il y a bien un marché à prendre dans ce secteur. Michaela, qui a acquis les connaissances et l'expérience nécessaires pour fabriquer des produits adaptés aux morphologies généreuses, aimerait pouvoir collaborer et conseiller à l’avenir des marques de lingerie souhaitant explorer cette nouvelle conception, cette nouvelle offre, créer des « produits délicats pour les corps voluptueux qui sont si souvent laissés-pour-compte. ».Intrigués par cet artiste ? retrouvez ses modèles iconoclastes surhttps://www.michaelastark.com/panty
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