Le carnet d'Intima
11 January 2017
... de les faire porter par des mannequins pour les photographier. Difficile de trouver de jeunes et jolies jeunes filles disposées à se montrer si dénudées – les premiers clichés ne montraient pas leur visage – d’autant que les photos devaient aussi être publiées dans un magazine. C’est ainsi que Vito Pisani lança le tout premier magazine de lingerie en Italie.
Soixante ans plus tard, l’agence milanaise est devenue le principal media professionnel du secteur, avec une présence mondiale via ses titres et les nombreux événements qu’elle organise. Revenons, avec Ghislaine Rayer et Patrice Gaulupeau, experts et collectionneurs, sur cette année fatidique et pleine de rebondissements.
La course à l’espace En 1957, à son deuxième mandat, Dwight D.“Ike” Eisenhower est le Président des Etats-Unis, et Richard Nixon son Vice-Président. Nikita Kruscev, successeur de Staline et père de la déstalinisation est, lui, à la tête de l’Union Soviétique et, en 57, doit faire face à une tentative de coup d’Etat menée par un groupe d’extrémistes conservateurs. En République Populaire de Chine, le pouvoir est dans les mains Mao Tsé-Toung; ce sont les années de la Révolution Culturelle. En pleine Guerre Froide – qui, en 1957, avec la réouverture du Canal de Suez, connaît le dénouement de l’une des plus graves crises de l’après-guerre – , la partie entre bloc oriental et occidental se joue sur le champ de la course aux armements et du défi nucléaire, mais, l’année 1957 élargit les règles du jeu. Le 4 octobre, l’Union Soviétique lance Spoutnik, le premier satellite artificiel envoyé en orbite autour de la Terre : c’est le début de la « Conquête de l’Espace », qui enclenchera de nouvelles dynamiques internationales USA-URSS sur l’axe du progrès technologique et scientifique.
Le miracle économique. Oubliées les difficultés de l’après-guerre et les coûts de reconstruction, le monde occidental est en plein boom économique ; l’augmentation de la production et le rapide développement urbain s’accompagnent d’un vertigineux essor du commerce international. En Europe, le 25 mars1957, avec la signature du Traité de Rome entre France, Italie, République Fédérale Allemande, Belgique, Pays-Bas et Luxembourg, naît la Communauté Economique Européenne (CEE) – première étape de l’actuelle Union Européenne – qui établit la libre circulation des personnes, des biens, des capitaux et des services, et la Communauté Européenne de l’Énergie Atomique (Euratom), destinée à cordonner les programmes de recherche sur le nucléaire, tout en veillant à son utilisation pacifique.
Le mythe de la FIAT 500. Avec une urbanisation croissante et les conséquents
nouveaux besoins de mobilité, l’automobile entre dans la vie quotidienne des gens en tant que
moyen de transport individuel et familial, symbole d’un nouveau bien-être économique.
Si, aux Etats-Unis, les voitures de masse sont une réalité depuis la lancement
de la Ford T en 1908, en Europe, il faudra attendre 1957 pour que la première
Trabant – l’historique « voiture du peuple » – sorte des usines de
Zwickau, en Allemagne de l’Est,
pour longtemps seule voiture disponible en DDR, restée en production
jusqu’aux années 90. Mais la vraie révolution aura lieu le 4 juillet, à Turin,
avec le lancement, par le constructeur italien Fiat, de la Nuova 500, destinée à révolutionner le monde des voitures
utilitaires et à devenir l’une des icônes internationales du design industriel.
La découverte du « temps libre » . Dans un climat de confiance retrouvée et d’optimisme, l’on redécouvre enfin les petits plaisirs de la vie quotidienne: les sorties, les activités en plein air… C’est en 1957, par exemple, qu’a été lancé le premier « Pluto Platter », bien plus célèbre sous le nom de Frisbee, produit par la société Wham-O, à l’origine aussi, l’année suivante, du phénomène Hula Hoop. C’est au cours des années 50 que l’on découvre le concept « temps libre », espace de liberté personnel, en dehors de toutes contraintes personnelles ou professionnelles; des mots tels que « hobby » ou « week-end » entrent dans le vocabulaire commun et viennent agrémenter le quotidien, à l’instar des congés payés.
La vague rock'n' rollEn 1957, Elvis Presley est au top des classements « Jailhouse rock » et
« Loving you », les soirées sont endiablées au rythme du rock’n’roll et les
jukebox chantent « Great Balls of Fire » de Jerry Lee
Lewis, « Wake Up Little Susie » des Everly Brothers,
« Diana » de Paul Anka. La même année, Bobby Helms enregistre « Jingle
Bell Rock », l’une des chansons de Noël les plus célèbres de
tous les temps. Incontournables aussi, dans un autres style : Ella
Fitzgerald et Louis Armstrong, qui nous offrent
l’inoubliable version de Summertime, tandis que Frank Sinatra travaille
sur son chef d’œuvre de 1958 (Come Fly with me), Simon & Garfunkel commencent
à chanter ensemble et Harry Belafonte devient
mondialement célèbre avec « The Banana Boat Song ».
Du grand au petit écran. En 1957, on va au ciné en famille ou entre amis, l’après-midi de préférence, pour voir « Le pont sur la rivière Kwai » avec Alec Guinness et William Holden, « Les sentiers de la gloire » de Stanley Kubrick avec Kirk Douglas et « Sayonara » avec Marlon Brando, déjà célèbre pour sa réputation sulfureuse; c’est aussi l’année de « Peyton Place » avec Lana Turner et « Elle et lui » avec Cary Grant et Deborah Kerr, et, bien sûr, du scandaleux « Et Dieu créa la femme » avec une sublime et troublante Brigitte Bardot. Caractéristiques de l’époque, les films musicaux, aïeuls des vidéo-clips actuels, attirent un large public de jeunes. La radio, tristement célèbre pendant la guerre, connaît son Âge d’or avec toute une série de programmes de divertissement mélangeant chansons et variétés, qui ne tarderont cependant pas à être détrônés par la télévision. Aux Etats-Unis, les premières séries arrivent sur le petit écran: en 1957 sort le légendaire « Perry Mason » sur CBS, ainsi que la première version télé de Zorro sur ABC.
Tous aux caisses !
Vers la fin des années 50, la croissance économique et la modernisation des styles de vie mènent à une transformation radicale de la façon de consommer. Bien que le premier supermarché ait été ouvert à New York en 1930, c’est à partir de l’après-guerre que le système se répand en Europe et notamment en Allemagne avec Aldi (1948), puis en France avec Edouard Leclerc (1949) et en 1957 en Italie avec Esselunga. C’est le début de la grande distribution organisée: rayons pleins de tout type de produits, en libre service, avec payement aux caisses, à des prix défiant toute concurrence. Encore un changement radical dans la gestion du quotidien, qui aura un impact significatif et durable sur le rapport à l’alimentation.
La fée du logis s’émancipe
Au cours de la décennie 1950, l’objectif principal d’une femme est de se marier pour fonder une famille. Ensuite, son existence sera essentiellement tournée vers l’organisation du logis et le soin des enfants, et ce, sous l’autorité suprême de son mari, le « chef de famille ». Ainsi, l’éducation reçue par les jeunes filles a pour but d’en faire des bonnes épouses et mères, destinées à succéder à leurs propres mères dans la gestion familiale. La femme est alors sûrement belle et apprêtée, mais sait aussi se tenir à sa place, comme le rappelle le fameux article « The Good Wife’s Guide » qui publie, en 1955, une liste de conseils à suivre pour devenir la femme parfaite.
Parallèlement, la progressive diffusion des appareils électroménagers contribuera à libérer les femmes de nombreuses tâches répétitives et ingrates. Cette réorganisation des travaux domestiques portera, petit à petit, à la transformation du rôle social de la femme, qui, moins occupée aux tâches quotidiennes, se découvre d’autres intérêts et aptitudes, aussi en dehors de la sphère familiale. Dans la redéfinition des territoires, le poste de radio, le tourne-disques, puis la télévision, deviennent le nouveau centre de l’agrégation familiale. Un changement d’époque visible aussi dans les publicités : si, au début, les réclames des électroménagers vantent les mérites de la « parfaite ménagère », à la fin des année 50 apparaissent les premiers signes d’émancipation. De plus en plus de femmes commencent d’ailleurs à travailler et occupent des postes typiquement féminins tels que secrétaire, esthéticienne, interprète et, le summum, hôtesse de l’air (aux USA c’est l’Âge d’or de la Pan Am et, en 1957 naît Alitalia).
Le saviez vous? En 1957…
La Hamilton Watch Company présente la première montre-bracelet avec mouvement électronique
Althea Gibson est la première joueuse de tennis de couleur à gagner le tournoi de Wimbledon
West Side Story de Leonard Bernstein, premier “musical” en langue anglaise à porter sur scène des thématiques sociales controversées, fait ses débuts à Broadway
Sort le premier numéro de la revue GQ
Aux USA sont émis les premiers billets de 1 dollar avec la devise « In God We Trust »
Martin Luther King prend la tête de la Southern Christian Leadership Conference, premier mouvement en faveur des droits des noirs américains, et paraît sur la couverture du Time
William Hanna & Joseph Barbera fondent la « Hanna & Barbera Productions », qui sera à l’origine de personnages parmi les plus aimés: Tom & Jerry, Braccobaldo, l’Ours Yoghi, les Flinstones, Scooby-Doo, les Schtroumpfs…
Les lauréats du cru 1957
Les Prix Nobel
Littérature: Albert Camus (écrivain, philosophe, essayiste, dramaturge et activiste français)
Paix: Lester Pearson (homme politique canadien, salué pour son rôle dans la résolution de la Crise de Suez)
Médecine: Daniel Bovet (pour ses recherches dans le domaine de la chimiothérapie et de la pharmacologie)
Physique: Chen Ning Yang e Tsung-Dao Lee (les deux premiers chinois à gagner le Nobel)
Chimie: Lord Alexander Robertus Todd (pour ses recherches sur la structure et la synthèse des nucléosides et des nucléotides)
Les Oscar
Cérémonie de remise des prix des Academy Awards, Los Angeles, 25 Mars 1957
« Le tour du monde en 80 jours », avec David Niven et Shirley MacLaine (Meilleur Film)
Yul Brynner (Meilleur Acteur) pour « le Roi et moi »
Ingrid Bergman (Meilleure Actrice) pour « Anastasia »
« Géant » de George Stevens (Meilleur réalisateur): le dernier des trois film avec James Dean, succombé lors d’un tragique accident de voiture après le tournage)
« La Strada » (Meilleur Film Etranger), réalisé par Federico Fellini et produit par Dino De Laurentiis
My Fair Lady, avec Julie Andrews, remporte le Tony Award pour le Meilleur Musical
« Profiles in courage », écrit par le jeune sénateur John Fitzgerald Kennedy, gagne le Prix Pulitzer pour les biographies.
Miss Monde 1957 est la finlandaise Marita Lindhal
Miss Univers 1957 est la péruvienne Gladys Zender
Le règne de la Haute-Couture
Pour la Haute Couture, 1957 est une année charnière avec le décès de Christian Dior, la reprise du style par Yves Saint Laurent, tout juste âgé de 21 ans, qui renverse les codes établis en proposant une silhouette radicalement différente avec sa ligne Trapèze qui ignore la taille et assure une plus grande liberté de mouvement. Quelques mois plus tard, il présentera ses robes « Empire » serrées sous la poitrine. Quant à Hubert de Givenchy, il crée la fameuse robe « Sack » aux lignes droites. A l’approche des années 60, Mary Quant raccourcit notablement ses robes et commence à introduire la mini-jupe qui deviendra l’un des plus gros phénomènes des Sixties. Les années 50 auront été l’âge d’or de la Haute Couture parisienne et le berceau du prêt-à-porter. La couture est à la mode et de très nombreux stylistes essaient de se partager ce nouveau marché de moins en moins élitiste. Parmi les grands, en dehors de Dior, St Laurent et Givenchy, il y avait aussi Balmain, Patou, Jacques Heim, Jacques Fath, Cardin et Balenciaga. Mais aussi, ce qui peut paraître surprenant aujourd’hui, un nombre très impressionnant de femmes à la tête de grandes maisons comme Nina Ricci, Maggy Rouff, Grès, Lanvin et la plus célèbre d’entre toutes : Gabrielle Chanel.
Les icônes du cinéma
Brigitte Bardot, la star française, est une icône de la mode qui crée et lance plusieurs tendances : robes froufroutantes de babydoll marquées à la taille d’une large ceinture, pantalons corsaires associés à une marinière, hauts à col large et aux épaules dénudées (ce type de décolleté s’appelle désormais l’encolure Bardot).
Elle popularise les ballerines créées spécialement pour elle par Repetto (le mythique modèle Cendrillon) qu’elle porte dans Et Dieu créa la femme, mais restera à jamais celle qui a lancé la mode du vichy en se mariant en 1959 dans une robe à carreaux vichy rose.
Marilyn Monroe fait la toute première couverture du magazine Playboy en 1953 et restera l’icône pin-up des années 50. Actrice et chanteuse, son rôle dans le film "Sept ans de réflexion" et ses formes pulpeuses lui valent l’étiquette de la femme la plus glamour. Qui ne se souvient pas de la scène mythique dans laquelle l’actrice retient sa robe blanche au-dessus d’une grille de métro… Elle est sans conteste LE sex-symbol de l’époque.
Grace Kelly accède vraiment à la célébrité après son passage dans le film "Le train sifflera trois fois" avec Gary Cooper. La princesse qui débarque à Monaco avec ses 60 valises de vêtements est l’incarnation même de l’élégance.
Audrey Hepburn entretient une histoire d’amitié pendant 40 ans avec le créateur Hubert de Givenchy qui lui confectionnera l’incroyable robe fourreau pour le film "Diamants sur Canapé", et ses petites robes noires . La star est une référence dans l’art de porter des accessoires très féminins dans un style plutôt austère.
Elizabeth Taylor, la Cléopâtre du film de Mankiewicz est une adepte de la haute joaillerie, des fourrures et de la haute couture et est l’égérie du grand luxe
Sophia Loren, dans l’ère des formes généreuses, avec son éternelle rivale Gina Lollobrigida, incarne la « Diva » italienne per excellence. Concentré de féminité sensuelle, elle jouera aux côtés des stars les plus célèbres de l’époque : Cary Grant, Anthony Quinn, William Holden. Oscarisée en 1962 avec « La Ciociara », elle est rentrée à jamais dans l’imaginaire collectif au travers de scènes inoubliables telles que celle du mambo avec Vittorio de Sica dans « Pain, Amour, ainsi soit-il » ou le célèbre strip-tease pour Marcello Mastroianni dans « Hier, aujourd’hui et demain ». C’est en 1957 qu’elle fuit au Mexique avec le producteur Carlo Ponti, l’amour d’une vie, avec qui elle se mariera par procuration.
Le look fifties
Les femmes des années 50 n’ont qu’un seul mot d’ordre : être féminines ! De cette époque, on se souvient surtout du style «New-Look», lancé par Dior en 1947 : silhouette caractérisée par son buste moulant, une taille très marquée et une ample jupe « corolle » en dessous du genou. Si la taille de guêpe est restée une constante jusqu’aux années 60, il ne faut pas résumer cette décennie à des tenues en forme de sablier tant le foisonnement stylistique de l’époque était important. En 1957, dans le dressing de la femme élégante, on trouve des jupes à corolle aux imprimés de couleurs vives, des robes bustiers, mais aussi des jupes « crayon », un modèle près du corps et en-dessous des genoux qui va connaître son heure de gloire grâce à Marilyn Monroe ou encore Grace Kelly, une pièce chic qui se fera une place dans le vestiaire de toute une génération. Cependant, en cette fin de décennie, une mode plus décontractée commence à voir le jour : pulls moulants, pantalon corsaires et robes plus fluides, moins près du corps.
Parmi les accessoires phares de la décennie:
- Le col claudine : c’est la belle Audrey Hepburn qui apparaît la première en chemisier rouge à col Claudine ! Cette silhouette de femme-enfant provoquée par cette blouse au col rond lui vaut l’adhésion de toute sa génération qui se met elle aussi à imiter le col de la fameuse héroïne de Colette dans « Claudine à l’école ».
- Les chapeaux et bibis : si les femmes des années 50 se coupent les cheveux ou adoptent le chignon , c’est pour mieux porter le chapeau ! Le chapeau rond et oversize à la Audrey Hepburn était très tendance, mais le bibi, sa petite version, également ! Ces couvre-chefs étaient des signes d’une grande élégance.
- Les escarpins à bout pointu et les chaussures bicolores dont la tendance est lancée par le bottier Raymond Massaro lorsqu’il il crée son escarpin bicolore à talons pour Coco Chanel en 1959. La signature de la Maison Chanel adopte très vite l’imprimé bicolore, et les petites ballerines beiges au bout noir deviennent à la fois la marque de fabrique, et un must-have de la période.
- Le sac 2.55 de Chanel, la grande Maison de couture lance son sac mythique et iconique en février 1955, comme l’indique l’appellation « 2.55 », ce sac matelassé avec sa chaîne dorée sera le produit culte de la marque. Quant à Grace Kelly, elle relancera en 1956 la mode d’un sac Hermès (appelé Kelly depuis), en cachant son début de grossesse avec ce fameux sac.
- Les longs gants portés au-dessus du coude pour un effet très chic ! Les longs gants, en soie ou en satin, accompagnent les robes de soirée mondaines des années 50. Ils furent des accessoires emblématiques dans les films « Diamants sur canapé » avec Audrey Hepburn ou « Gilda » avec Rita Hayworth. Quant aux gants courts, ils restent indispensables pour sortir en journée, été comme hiver.
Le renouveau
Comme pour la mode et la Haute-Couture, le monde de la lingerie va changer et évoluer. Les marques françaises anciennes seront pratiquement toutes remplacées par de nouvelles en moins de quinze ans. Les « Trente Glorieuses », les années comprises entre 1945 et 1975 sont un profond bouleversement pour l’industrie et le commerce. Les règles de production et de diffusion ont énormément évoluées, et de très nombreuses marques phares de lingerie telles que Libron, Silhouette, Star, Prestige, vont disparaitre, ainsi que les grandes corsetières parisiennes, à l’exception de Cadolle. Elles vont laisser la place aux nouvelles marques françaises qui vont pratiquement toutes naître en l’espace d’une douzaine d’années, entre 1946 et 1958 : Lou, Boléro, Empreinte en 1946, Rosy en 1947, Simone Pérèle en 1948, Chantelle en 1949, Lise Charmel en 1950 et Aubade en 1958. Seules les marques Barbara, Lejaby et Scandale, qui ont des racines remontant aux années 30, réussissent à franchir les années 60 en s’adaptant aux nouvelles règles. Ce sera le cas aussi en Allemagne avec des entreprises plus que centenaires comme Felina, née en 1885, mais aussi Triumph et Anita, créées l’année suivante. Elle remonte d’ailleurs à 1954 la commercialisation du célèbre modèle Amourette de Triumph, qui fût aussi la première marque à faire défiler ses mannequins sans le body noir de rigueur sous la corseterie. De son côté Anita redémarre son activité à Brannenburg, où elle mettra au point les produits techniques qui l’ont rendue célèbre dans le monde. En Italie, Imec était déjà une marque reconnue lorsque, en 1954 naît La Perla, l’incarnation la plus accomplie du style Made in Italy qui marquera à jamais l’image de la lingerie. A ne pas oublier non plus les autres entreprises toujours présentes telles Zimmerli (1871) et Hanro (1884) ou encore les italiennes Ragno (1879), Lisanza (1920) et Oscalito (1936), sans oublier Calida (1941) ou Wolford (1950). Aux Etats-Unis Warner – la marque de lingerie la plus ancienne au monde (1874) – se faisait désormais concurrencer par Maidenform et Playtex – avec notamment sa célèbre gaine en latex, tandis qu’au Japon le renouveau est incarné par Wacoal, fondée en 1946, mais qui devient Wacoal Inc. en 1957.
Les dessous en 1957
Selon le président de la Chambre Syndicale de la Haute Corseterie, voici les canons de la ligne 1957 : « Le buste doit être étiré, les seins ronds, les hanches galbés, le port d’une gaine et d’un soutien-gorge spécialement adaptés sont indispensables pour porter les nouvelles robes à ligne fluide avec toute l’élégance requise. ».
En 1957 deux silhouettes bien différentes sont à la mode : la robe fourreau ou la robe ample. Pour ces deux lignes, les magazines féminins de l’époque conseillent à leurs lectrices une corsetterie adaptée :
Pour le fourreau, un combiné d’une seule pièce ou une gaine montante accompagnée d’un bustier.
Pour les robes à corsages moulés et à jupes amples, une guêpière modelant le buste et la naissance des hanches, ou encore le grand combiné porte-jarretelles.
Opération jupon!
Et pour donner de l’ampleur aux jupes et robes évasées, il est nécessaire de porter un jupon. Presque toujours en nylon, le jupon est simple ou double, additionné dans sa partie basse de volants apprêtés ou de dentelles rigides. Très souvent blanc, il peut être aussi « fantaisie », de couleurs très gaies ou d’imprimés fleuris. Les grandes marques de cette époque sont, Hélios, Gui, Chesterfield et surtout Neyret, dont le luxe de la production rivalise avec la lingerie de Haute Couture. Cette mode s’amplifiera jusque dans les années 60, où l’on portera, pour une ampleur maximum, des jupons-crinolines munis à l’extrémité basse, d’un cercle de plastique semi-rigide
Chewing-gums, cigarettes et… bas couture
Lors de la libération, les G.I. américains étaient arrivés en France avec les chewing-gums, les cigarettes américaines, le jazz, les barres de chocolats, les pin-up… et les fameux bas nylon à couture ! Au milieu des années 50 le bas sans couture est inventé (fabriqué sur un métier circulaire) et restera indispensable jusqu’à l'apparition en 1959 des premiers collants qui permettaient le port de la mini-jupe. Ils resteront à jamais au Panthéon de la lingerie sexy avec leurs porte-jarretelles.
Sacrés décolletés
Dans les années 50, les femmes assument leur poitrine et veulent la mettre en valeur. L’influence des stars hollywoodiennes fait entrer du glamour dans la lingerie. C’est la mode du Dolly avec sa forme « obus », qui sera prisée par les femmes dans leur volonté de ressembler à ces stars aux poitrines rondes et généreuses.
Aux USA, la marque La Resista crée un ovni, il s’agit d'un push-up gonflable, qui permet, au moyen d'une paille, d'ajuster son tour de poitrine au gré de ses besoins ou de son humeur… Pour la petite histoire, La Resista, marque américaine, commercialisera ce soutien-gorge gonflable aux Etats-Unis sous le nom français de « Très Secrète », quand Scandale, marque française, le commercialisera sous le nom de « Very Secret »… marketing oblige !
En 1956 la marque Lejaby lance le soutien-gorge pigeonnant qui fit fureur jusqu’au milieu des années 60.
Les premiers gainants
Les robes fourreau très près du corps, vont créer le besoin d’une corseterie longiligne et toutes celles qui ne voudront pas porter le combiné (très couvrant et assez contraignant) pourront le remplacer par une gaine haute. Créée pour affiner la silhouette, la gaine montante est en tulle élastique nylon deux sens, remontant sur le buste, elle galbe la taille avec souplesse et efface ventre et dos. Très longue, la gaine possède souvent un soufflet élastique dans le bas, permettant ainsi plus d’aisance pour la marche.
Le tabou de la guêpière
Voilà 10 ans que Marcel Rochas et Marie-Rose Lebigot ont inventé la guêpière qui se porte encore très bien en cette année 1957, mais dont le nom est curieusement banni. On l’appelle Corselet, Justaucorps, Petit Combiné, gainière, corset-jupon, ou même, pour éviter de la nommer, on décrit sa forme et ses matières.
Positionnées sur le segment « luxe », la plupart des guêpières furent produites entre 1948 et 1960. Victime d’une mode changeante, d’un prix de vente élevé et d’une charge érotique trop prononcée pour l’époque, la guêpière disparait rapidement des devantures des corsetières pour devenir un fantasme cinématographique. Pour le plaisir de tous, ce sont désormais Sophia Loren, Anouk Aimée, Lana Turner, Marilyn Monroe ou encore Brigitte Bardot qui portent la célèbre guêpière, immortalisant ainsi pour toujours cette pièce de dessous féminins.
Les matières en vogue
Deux matières employées pour la lingerie et la corseterie sont prédominantes en cette année 1957, le Lastex inventé en 1930 et le Nylon inventé en 1939. Ces deux inventions américaines seront incontournables jusqu’en 1960, date de l’arrivée d’une autre fibre révolutionnaire, le Lycra. Le Lastex, baptisé par ses inventeurs, La fibre miraculeuse, (The miracle Yarn), est la réunion d’un fil de latex (caoutchouc), associé à un fil d’une autre matière qui peut être du coton, de la soie ou de la viscose. Cela donne pour la première fois un tissu légèrement extensible. On est encore loin du stretch mais c’est déjà un énorme progrès. La lingerie, la corseterie et surtout le balnéaire en seront les principaux bénéficiaires.
Le Nylon, quant à lui, sera une véritable révolution. Inventé en 1939 par Dupond de Nemours, le Nylon commencera sa fulgurante carrière dans la fabrication des bas dès 1940, production très vite arrêtée pour cause de guerre mondiale, la totalité des capacités de production étant alors réservée à l’industrialisation massive de parachutes. Dès la fin du conflit, le Nylon sera omniprésent dans la vie quotidienne, mais aussi et surtout dans la lingerie. Facile à lavée, vite séchée et sans avoir besoin d’être repassée, cette nouvelle fibre change radicalement la vie quotidienne des femmes.
La fabrique des rêves
Dans les années 50 Maidenform, la célèbre marque américaine née en1922, révolutionne l’histoire de la publicité en lingerie avec sa légendaire campagne « I dreamed I.... in my Maidenform bra », qui durera plus de vingt ans: une véritable saga où une femme rêve « d’avoir fait quelque chose » endossant son soutien-gorge Maidenform. Pour l’année 1957 les slogans étaient: « I dreamed I … had Tea for Two, I posed fro a fashion ad, I crashed the headlines, I was lost in London fog , I raced in the wind… », tous avec my Maidenform Bra!
En France, si quelques images, comme celle de Scandale, montrent une femme séductrice dans des poses lascives, la plupart des publicités orientent leurs discours vers la femme au foyer. La femme LOU déclare « Mon mari avait raison, mon ancien soutien-gorge m’alourdissait la silhouette…» ; il n’est pas encore question de se plaire mais de faire plaisir à son mari !
L’influence d’Hollywood et de ses femmes fatales commence à se faire sentir, et on voit apparaître les premières photos de vraies femmes en lingerie. Les poses restent encore figées et on s’en remet aux accessoires pour égayer l’atmosphère.
Il faudra attendre la fin des années 60 et la libération des mœurs pour que l’image d’une lingerie sulfureuse se fasse plus explicite. La nouvelle publicité va proposer l’image d’une femme active et libérée, oscillant entre féminisme et féminité.
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